mardi 11 mars 2014

Journal du dimanche 20/08 - 68,2 km pédalés


De Cunha à Paraty


Lors de la dernière journée, nous finalisons notre voyage avec une cerise sur le gâteau et seulement un rayon cassé comme accident de parcours, dévalant la bonne vieille serra de Cunha jusqu’aux eaux de la baie de Paraty .  
Après quelques heures de pédalage, sur la route Cunha-Paraty, nous remarquons un curieux autant qu’efficace moyen de transport : une “moto/camionnette” qui roule sur le bas-côté dans la même direction que nous mais  de l’autre côté de la piste.Le chauffeur semble transporter un sanglier à l’arrière du véhicule, tout à coup il s’arrête. Nous faisons de même. Je descends du vélo la caméra à la main. Je n’avais jamais vu de sanglier vivant. Je suis un peu déçue.

C’est juste un cochon roux qui transpire à grosses gouttes à cause de la chaleur.   Fier comme Artaban, son propriétaire me dit que son “pet” s’appelle “Tchutchuca”! Oui, c’est vraiment son nom, Tchutchuca ! Même en portugais, ça sonne d’une manière assez marrante.  Nous parcourons 30% d’asphalte lors de la première partie du trajet, puis 50% de terre et encore 20% d’asphalte pour la troisième partie, jusqu’à arriver à Paraty. Sur l’asphalte, malgré la chaleur, nous ne peinons pas beaucoup, tout est sous contrôle jusqu’à l’arrivée à la serra de Cunha.

 
Le plus grand défi de notre dernier jour sur la Route Royale est la Serra de Cunha. Nous ne savons pas comment les freins vont réagir. Mathieu me promet qu’il va rouler doucement. Pour l’avoir déjà faite à vélo, nous sommes conscients que cette descente est assez « punk ». Celui qui est à l’arrière du tandem n’a pas le temps ni la vision nécessaire pour prévenir une chute  dans une telle descente. Il faut sentir le mouvement, suivre le commandement du capitaine, fermer les yeux et prier pour ne pas déchausser du cale-pied, chose qui m’était déjà arrivée auparavant.  


Dans l’ultime descente de la Serra de Cunha, j’ai beau hurler :“j’ai déchaussé, Mathieu, j’ai déchaussé !”, le tandem, dévale la pente tel un fou furieux et me balance pour ainsi dire dans la  Serra do Mar. Si je tombais, Mathieu ne le verrait même pas. Et voilà, aujourd’hui, au milieu de la Mata Atlântica à l’odeur de terre et de feuillage, c’est le début du “commencement de la fin”, on sait que, en terminant la  serra de Cunha, notre voyage va se diriger vers une mort douce et lente.  

Le capitaine garde le cap en douceur et se relâche enfin. C’est génial! Hallucinante cette descente ! Cette fois-ci, je sens plus en sécurité et j’y prends plus de plaisir….jusqu’à ce que le frein soit momentanément aux abonnés absents puis daigne, sans autre forme d’explication, répondre à nouveau quelques longs instants plus tard ! Mathieu attend le moment propice pour arrêter le tandem.  Le frein à disque est   en surchauffe ! Un rayon s’est cassé. Nous en profitons pour nous désaltérer tout en nous perdant en conjonctures sur les éventuelles conséquences qu’auraient pu entrainer cet incident. Nous regrimpons finalement sur notre monture pour clore le trajet.   

Il est presque 3 heures de l’après-midi et nous mourrons d’envie de nous refaire cette descente une fois de plus dans la journée.  Mais on préfère aller déjeuner dans un restaurant  entouré de cascades d’eau peu avant l’entrée de Paraty. Ce n’est pas un sentiment de “victoire” qui nous étreint mais plutôt une sensation   post-orgasmique, sauf qu’au lieu de fumer une clope, on retire nos casques pour commander un plat de spaghettis « maison ».    

Avant de sortir du restaurant, nous allons nous baigner sous une cascade. En l’espace de quelques minutes, nous sommes à Paraty. Nous déchargeons les bagages à l’auberge, sans aucune poussière sur le corps après notre bain improvisé, et le compteur indique 68.20 km parcourus lors de ce neuvième jour de pédalage.  Nous montons dans notre chambre. 

Paraty fût peuplée vers 1533, assaillie par les corsaires anglais et français à l’époque de l’or (XVIIIème siècle), elle fût aussi l’antre d’expéditions indigènes et son port fût le théâtre de nombreuses batailles navales. Sitée à peine à 5 mètres au-dessus du niveau de la mer, comptant quelques 33 mille habitants, elle est fameuse pour ses eaux-de-vie - au XVIIème siècle, elle possédait déjà 150 distilleries – et en 2003, elle a fait son entrée dans le circuit intellectuel avec le   FLIP (Festival de Littérature International de Paraty).

 
Nous y resterons deux jours, sans pédaler et en imposant à nos jambes des mouvements différents. Nous marcherons dans le sable, plongerons dans la mer et trainerons nos sandales à travers les rues pavées du Centre Historique de la ville. Paraty a toujours été pour nous une invitation à assouvir notre gourmandise.     La pizza à pâte fine et croquante du Punto Divino, la délicieuse cuisine thaïlandaise du Thai et les excellents sorbets italiens sur la place principale

On va se transformer en mollusques sur la plage. Nous ferons une promenade en bateau vers les iles de la baie. Nous débarquerons sur l’ile de Catimbau pour y déguster du poulpe à la vinaigrette et boire une rafraichissante batida de coco saupoudrée de cannelle. Mais il nous reste avant cela à planter le drapeau du couple Fuentes/Gillot un peu avant l’entrée de Paraty, devant la borne de la Route Royale. En réalisant ce que nous avons fait, nous comprenons la raison de notre plaisir et notre fatigue.   

Nous avons parcouru 650 km en neuf jours et connu un peu plus de 500 ans d’histoire du Brésil Colonial. Plaisir et fatigue: les deux sentiments  sont intrinsèquement mêlés en nous. Nous sommes tristes de ne pas avoir une autre “destination”, mais nous remercions Garcia Rodrigues d’avoir ouvert le Vieux Chemin de l’Or. Emus, nous nous embrassons sur la ligne d’arrivée.  Ceci était notre premier voyage en tandem d’une série appelée à connaitre d’autres épisodes ! ◘ FIN DU JOURNAL

Aucun commentaire: